Messiah, HWV 56 (1741) Georg Friedrich Händel (1685-1759) Oratorio sur un texte compilé par Charles Jennens Créé au New Music Hall, à Dublin, le 13 avril 1742
Soprano : Amanda Forsythe Alto : Christopher Lowrey Ténor : Jason Bridges Basse : Nahuel di Pierro
Chœur de Chambre de Namur Les Talens Lyriques Direction : Christophe Rousset
Jennens avait déjà fourni à Händel le livret de ses premiers grands oratorios – Saul (1739), L’Allegro, il Penseroso ed il Moderato (1740), et sans doute aussi Israel in Egypt (1739), – se faisant ainsi le collaborateur précieux du tournant opéré par le compositeur, les Britanniques boudant en effet l’opéra italien dont Händel était l’un des chefs de file à Londres jusqu’à la fin des années 1730. Händel, alors en proie à un grand abattement, s’empare du livret et se jette à corps perdu dans l’écriture de ce Messie, dont on sait, grâce à une correspondance et des témoignages fournis, qu’il la commença le 22 août 1741 pour y mettre un point final le 14 septembre !
Véritable architecte de l’œuvre, Jennens offrit à Händel un livret à la fois complexe et novateur. Il se compose des trois parties conventionnelles, mais fait la part belle aux chœurs, qui représentent vingt numéros sur cinquante-deux. Contrairement aux autres oratorios, il ne s’agit pas ici d’une narration à proprement parler, mais véritablement d’un discours théologique. La vie du Christ est présentée de façon symétrique entre Ancien et Nouveau Testament, des prophéties à leur accomplissement. Ainsi sont convoqués tout à la fois les mystères de l’Incarnation, de la Nativité, la Passion et la Résurrection, ainsi que les Psaumes ou les Lamentations de Jérémie, au service d’une grande méditation sur la Rédemption. L’absence de narration ne nuit ainsi nullement à la conception générale, qui demeure extrêmement théâtrale : la musique supporte un ressort éminemment dramatique, bien qu’aucun des quatre solistes ni le chœur à voix mixte n’endosse un rôle précis, et qu’aucune mise en scène ou machinerie ne vienne illustrer le propos. Et c’est là la véritable gageure de ce chef d’œuvre absolu, qui se présente comme une fresque vivante, tout en pénétrant dans l’intimité d’une contemplation mystique et bouleversante.